Les écoles chrétiennes des Etats de la Fédération indienne gouvernés par la Bharatiya Janata Party (BJP) font face à un nombre croissant de poursuites judiciaires et d’attaques de toutes sortes depuis la victoire – pourtant relative – du parti nationaliste hindou aux élections législatives du mois de juin 2024.
La victoire sans triomphe du parti du premier ministre Narendra Modi aurait pu laisser espérer un peu de répit aux minorités religieuses, notamment à l’Eglise. Mais c’est la douche froide qui est venue : au mois de juillet 2024, dans l’Etat à majorité hindoue du Madhya Pradesh, les magistrats locaux instruisent une plainte contre une école catholique installée depuis un demi-siècle dans le district de Guna.
Son crime ? Faire réciter aux enfants des prières en anglais, ce qui serait de nature à « blesser les sentiments religieux des élèves », comme le rapporte la directrice adjointe de l’école, Sœur Rashmi Kuzhyil citée par Ucanews.
Le 22 juillet dernier, une cinquantaine de militants hindous sont entrés par effraction « dans l’école et ont commencé à crier des slogans, appelant au licenciement de la directrice », Catherine Vattoly, relate The Tablet. Ce cas n’est pas isolé.
Le 27 juillet suivant, d’autres fondamentalistes hindous ont fait irruption dans une école de l’Etat située à Indore, sur le territoire du diocèse de Jhabua, « remplaçant violemment » des images de la Vierge Marie et de l’apôtre saint Pierre, patron de l’établissement, « par des représentations de Sarawasti », la déesse indienne de la connaissance et des arts, explique The Tablet.
De plus, le gouvernement du Madhya Pradesh a accusé « trois autres écoles chrétiennes de percevoir des frais de pension excessifs », dans une action concertée à l’échelle de l’Etat, continue le journal.
En Assam, Etat du Nord-Est de l’Inde, également aux mains du BJP, les groupes nationalistes ont exigé les retrait des symboles religieux des écoles chrétiennes et ont demandé aux prêtres et religieuses de ne plus revêtir l’habit de leur état, car c’est, à leurs yeux, une « infraction à la loi anti-conversion ».
Mgr John Moolachira, archevêque de Guwahati, capitale de l’Assam, a réagi en demandant « à tous les établissements d’enseignement de son diocèse de déposer plainte auprès du gouverneur », relève The Tablet. La procédure n’a pas encore abouti à cette heure.
Dans l’Etat de Tripura, dans le Nord-Est, « des extrémistes hindous du groupe Bajrang Dal ont accusé une école chrétienne de pratiquer la discrimination contre des coutumes et des rites hindous ». Les Etats du Sud ont également connu de nombreuses attaques similaires ces dernières semaines.
Pourtant, on ne peut pas dire que l’Eglise n’ait pas donné de gages au pouvoir : lors d’une réunion avec Narendra Modi en juillet dernier, les représentants de la Conférence des évêques catholiques d’Inde ont assuré l’exécutif de leur « ferme opposition » aux conversions forcées, selon The Tablet.
Dans un souci d’apaisement – et pour couper l’herbe sous les pieds des fanatiques hindous – les prélats indiens ont même demandé à toutes les écoles de faire réciter à leurs élèves, avant les cours, le préambule de la Constitution de l’Inde, un texte décrivant le pays comme « une république souveraine, démocratique, socialiste et laïque », comme le rapporte encore The Tablet.
Cela sera-t-il suffisant ? Difficile de le dire, et les chiffres des attaques antichrétiennes sur les six premiers mois de l’année 2024 ne poussent pas à l’optimisme : selon le Forum chrétien uni, 361 « incidents » ont été enregistrés sur le territoire.
Un nombre très probablement sous-estimé, mais qui donne une idée de ce que subissent les catholiques vivant au sein de ce que les médias occidentaux décrivent avec naïveté comme la « plus grande démocratie du monde ».
Sources : The Tablet/Ucanews – FSSPX.Actualités
Illustration : ID 21704781 © Zatletic | Dreamstime.com