Menacés par les milices et ignorés par le pouvoir, les chrétiens d’Irak réclament la protection et une réforme électorale aux autorités nationales et internationales.

«Fondés sur notre sens profond de la responsabilité nationale et humanitaire, nous lançons une fois de plus un appel»: l’Alliance chrétienne en Irak a envoyé une lettre ouverte le 29 juin, qui cette fois-ci déborde des frontières. N’ayant «pas encore trouvé d’oreilles pour entendre les demandes» des croyants qu’elle représente, elle s’adresse au président de facto Massoud Barzani et à toutes les présidences irakiennes, mais aussi aux Nations Unies, aux membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, à l’Union européenne et à la communauté internationale dans son ensemble.

Double cri: sécurité et représentation politique

En plus de demander une intervention urgente contre la corruption issue des pratiques illégales des milices (contrebande, menaces et extorsions, trafic humain, de drogues, d’or entre autres), l’Alliance exige que la plaine de Ninive, région qu’elle défend principalement, soit entièrement libérée de leur présence par une action directe des institutions officielles, et protégée de «l’exploitation de ces milices et leur ingérence flagrante dans les affaires intérieures de notre peuple».

D’autre part, pour garantir une juste représentativité des chrétiens d’Irak, la faîtière réclame une réforme de la loi électorale du Conseil des représentants irakien, chambre du pouvoir législatif. Elle propose la création d’une liste électorale spécifique aux citoyens chrétiens, avec une inscription réservée aux membres de la communauté, des urnes distinctes et des bulletins séparés.

Cela permettrait, selon elle, de contrer toute manipulation extérieure. Cinq sièges parlementaires sur 329 sont réservés aux chrétiens, mais ce n’est aujourd’hui pas le cas dans les faits, dénonce la lettre. Si cette réforme électorale ne peut être mise en œuvre d’ici les prochaines élections législatives, prévues en novembre, l’Alliance demande que le vote concernant ces cinq représentants soit reporté.

«Nous vous demandons, au nom de l’humanité, d’écouter l’appel d’un peuple qui est à l’origine de ce pays et porteur d’une grande civilisation, et d’assumer vos responsabilités historiques et morales pour protéger son existence et ses droits», concluent les signataires.

Un berceau chrétien historique se vide

Au début des années 2000, l’Irak comptait environ 1,5 million de chrétiens. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 140’000, selon le Centre européen pour le droit et la justice. Majoritairement catholiques ou orthodoxes, ils représentent désormais moins de 1% de la population et subissent une pression croissante qui les pousse à fuir.

La plaine de Ninive, territoire emblématique de l’histoire chrétienne, est parsemée d’églises et de monastères datant parfois du 4e siècle, rappelait l’ONG Portes Ouvertes en 2024. Depuis la chute de Saddam Hussein en 2003, elle est devenue le principal refuge de la population chrétienne du pays. L’arrivée au pouvoir de l’Etat islamique à Mossoul, le 10 juin 2014, a amplifié le phénomène, tout en continuant de vider le pays des croyants qui s’exilent.

Source & Crédit Photo : Evangeliques.info