Le Lundi 18 décembre 2023, le dicastère pour la doctrine de la foi a publié une déclaration « Fiducia supplicans », traduit en français par « Confiance suppliante ».
Cette déclaration du dicastère avec l’approbation du saint Père, le pape François semble méduser les hommes d’église, ahurit la quasi-totalité des théologiens et même laisse pantois nombre de fidèles chrétiens qui affirment-ils semblent avoir le ciel sur la tête.
En effet, plusieurs voix sont montées au pinacle pour sonner l’arrêt de mort de la papauté du Saint Père François comme suppôt du « diable », ou des nouvelles puissances mondialistes comme le pouvoir LGBT+ ou tout simplement la décadence du « catholicisme ».
Loin de toute surenchère et de toute émotion, je nous propose une réflexion à partir de la déclaration (succincte) et une autre à partir du pontificat du pape François.
De la déclaration
La déclaration « Fiducia supplicans » comporte une présentation qui précise le travail d’expertise doublé d’un sens consultatif qui s’est fait à l’aune de la « doctrine pérenne (stable) de l’église », et de « l’enseignement du saint Père ».
En outre, après une introduction axée sur l’historicité de la déclaration, elle développe en quatre points (4) le projet prééminent de miséricorde divine rendu manifeste et tangible en la personne de Jésus qui passait en faisant le bien :
« L’Eglise est ainsi le sacrement de l’Amour infini de Dieu. C’est pourquoi, même la relation avec Dieu est obscurcie par le péché, il est toujours possible de demander une bénédiction, en lui tendant la main, comme l’a fait Pierre dans la tempête lorsqu’il a crié à Jésus : « Seigneur, sauve-moi » (Mt. 14, 30) ». (Document, n°43, point IV).
Comme on le voit l’ossature de la déclaration porte sur la possibilité de bénir les couples homosexuels et les personnes en situation de précarité en dehors de toute ritualisation et imitation du mariage. Aussi, cette bénédiction spontanée s’apparenterait davantage à un geste de « dévotion miséricordieuse ».
L’Eglise enseigne la vérité morale sur la doctrine en la défendant face aux conceptions et aux tendances erronées répandues aujourd’hui. Pourquoi l’Eglise le fait-elle ? Serait-ce qu’elle ne saisit pas le point de vue de ceux qui, dans ce domaine, conseillent des accommodements et qui cherchent à la convaincre même par des pressions indues, si ce n’est même par des menaces ?
En effet, on reproche souvent au Magistère de l’Eglise d’être maintenant dépassé et fermé aux requêtes de l’esprit des temps modernes, de mener une action nocive pour l’humanité et, plus encore, pour l’Eglise elle-même. En s’obstinant à rester sur ses positions — dit-on —, l’Eglise finira par perdre de sa popularité et les croyants s’éloigneront d’elle.
Mais, comment soutenir que l’Eglise, et spécialement l’épiscopat en communion avec le Pape, est insensible à des problèmes si graves et si actuels ?
Bien-aimés, le souci prééminent de Dieu est celui de sauver tout le genre humain comme le précise l’évangéliste Jean : « Dieu, en effet, n’a pas envoyé son Fils unique pour qu’il juge le monde, mais pour que le soit sauvé par lui ». (Jn. 3, 17).
Dès lors, nous pouvons l’entendre : nous sommes les sujets centraux du dessein de Dieu, le Père céleste et la raison fondamentale de la venue en chair de son Fils unique, Jésus-Christ.
Toutefois, il nous faut préciser qu’il ne s’agit point ici d’un dessein impersonnel encore moins générique. Mais, il s’agit d’un dessein personnel ; à savoir qui s’applique à chacun selon ses aptitudes et ces capacités à adhérer à sa Personne (Cf. Vocation d’Abraham Gn. 12, 1-2 ; de Moïse Ex. 3, 10 ; Isaïe Is. 6, 1-8 ; Jérémie Jr. 1, 4-10 ; de Pierre Mc. 1, 17 ; de Zachée Lc. 19, 5…).
De l’épiscopat du pape François.
En dix ans de pontificat, le pape François a publié trois (3) encycliques qui, il me semble sont la monstration de toute sa pensée mieux sa conviction de pasteur. En effet, il y développe la dimension rationnelle et relationnelle de l’être-homme et de son action sous un éclairage de la praxis pastorale.
Il a muri et discerné en outre, dans ses exhortations apostoliques, les notions de d’écologie, de fraternité, de la solidarité intergénérationnelle et celle de l’amour miséricordieux de Dieu.
Par ailleurs, en 2015, avec lui, nous vivions l’année de la miséricorde qui a été une véritable opportunité et une chance pour toute l’Eglise universelle. Car, elle nous a ouvert les yeux sur l’Eglise comme témoin de la miséricorde de Dieu pour le monde.
Aujourd’hui, dans la droite ligne de sa démarche pastorale, il a ouvert le synode sur la « synodalité » c’est-à-dire, questionner la marche d’ensemble de l’Eglise (prêtres-religieux-Laïcs) ensemble, dans la vérité et dans l’humilité.
Au-delà de toute agitation, la déclaration « Fiducia supplicans » n’interroge-t-elle pas « l’Impardon »1 ? De plus, que savons-nous de la douleur des autres ? Nous penchons-nous réellement sur la situation diverse et variée des autres ? Imaginons-nous tant soit peu la fatigue et/ou la situation de détresse des autres ?
Face à l’iniquité du pécheur, Dieu prend patience et lui fait miséricorde parce qu’il se laisse trouver et se rend proche pour qui le cherche et qui l’invoque. C’est ici évoqué le début d’une ère nouvelle, d’une ère de grâce pour l’homme et pour tout homme.
C’est en somme sur cette note d’espoir et en souscrivant à la lettre pastorale de son éminence, Jean-Pierre Cardinal KUTWA que j’invite tous et chacun à garder le calme et à faire confiance à la voix de l’Esprit Saint qui guide son Eglise quoiqu’apparemment chancelante.
Le dicastère s’efforcera très certainement dans les jours à venir de repréciser la terminologie de « bénir ».
Dieu aime le pécheur, mais hait le péché. Achevons par un désir de confier au Seigneur ainsi qu’à sa miséricorde les personnes vivant dans une union autre qui ne peut être comparée au mariage. Car, Dieu tend toujours la main au pécheur.
- « Substantif forgé par un certain Jean-Baptiste Richard, dit de Radonvilliers, dans son dictionnaire pour l’Enrichissement de la langue française, où il se définit comme l’« absence de pardon », la « persistance dans la vengeance » (Christophe PERRIN, « Une réalité sans nom : l’impardon » Dans Revue Philosophique de la France et de l’étranger 2017/2 (tome 142).
Source : Père Narcisse KOUASSI
