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Célébration : Les droits des femmes, un chantier d’Église

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À l’occasion du 8 mars, il semble de bon aloi de faire l’État des lieux des derniers acquis des femmes dans les milieux séculiers et ecclésiaux. Points de vue.

Le 6 février dernier, un accord entre le Parlement européen et les pays de l’Union européenne (UE) sur une première directive contre les violences faites aux femmes a été trouvé. Celle-ci introduit désormais la criminalisation et des sanctions en ce qui concerne les mutilations génitales, le mariage forcé et le partage non consenti d’images intimes, entre autres.

A un mois de la Journée internationale des droits des femmes, la députée européenne Frances Fitzgerald saluait notamment une «avancée cruciale en faveur de la protection des femmes des abus numériques bien trop banalisés», rapporte dans un communiqué le site du Groupe du Parti populaire européen (PPE). Elle déplore néanmoins que l’inclusion du viol dans cette même législation a échoué, la France et l’Allemagne s’y étant notamment opposés.

D’abord célébrée dans les pays du bloc de l’Est dès l’an 1909, la Journée internationale des droits des femmes a été officialisée en 1977 par les Nations unies. En 1914, les premières manifestations ont lieu un 8 mars, notamment à Berlin, pour l’obtention du droit de vote pour les femmes. Alors que la Suisse, tardive en la matière, a fêté en 2021 cinquante ans de suffrage féminin, l’acquisition de certains droits reste problématique pour les femmes dans d’autres parties du globe. Loin de l’abus commercial d’une journée durant laquelle la femme serait reine, c’est bel et bien de ses droits qu’il est question.

«Hérauts de la justice divine»

«La poétesse Emma Lazarus disait que “tant que tous les êtres humains ne sont pas libres, on n’est pas libres”. Aussi, tant que toutes les femmes ne sont pas libres, nous ne sommes pas libres non plus.» Lula Derœux a vingt-cinq ans et est pasteure baptiste à Gif-sur-Yvette. «Il ne s’agit pas de se sentir écrasés par le poids du travail, mais de se poser la question en tant qu’Eglise: qu’est-ce qu’on peut faire pour permettre que tout le monde soit libre ?», invite-t-elle.

Selon la jeune femme, cette journée permet de se concentrer sur ce qui doit encore être accompli pour que les femmes jouissent pleinement de tous leurs droits : «En tant qu’Eglise, on se doit d’être les hérauts de la justice de Dieu. Nous devons rappeler la dignité fondamentale qui se trouve dans chacun et chacune. Aussi, nous sommes appelés à nous battre contre les injustices de ce monde, quelles qu’elles soient.» Et de citer les nombreuses victimes de violence conjugale, de violence domestique ou de pauvreté, bien souvent majoritairement des femmes.

Pour une action concrète, elle encourage notamment à aider les associations engagées pour la protection des femmes ainsi que les dons financiers. «La vision de Dieu sur la femme est tellement plus belle que celle que la société peut proposer. En tant que chrétiens, on a cette perspective unique quant à l’homme et la femme. Sur l’échiquier du féminisme, on a une place capitale parce que nous proposons une vision que le féminisme laïc ne propose pas: celle d’une femme faite à l’image de Dieu.»

Pour les femmes victimes d’abus

Autre perspective sur un même état des lieux, celle de Célia Jeanneret, juriste au sein de l’association Perla, qui lutte contre la traite des êtres humains. «La journée du 8 mars revêt une importance toute particulière parce qu’elle nous rappelle le chemin déjà parcouru, mais également celui qui est encore devant nous», indique la Suissesse.

«Il y a soixante ans, la femme n’avait pas le droit de vote. Aujourd’hui, c’est acquis mais le combat continue.» Pour elle dont la mère a été une enfant violentée, l’exploitation et les violences faites aux femmes lui tiennent particulièrement à cœur : «Pendant la période des confinements liés au Covid-19, les statistiques de violence conjugale ont augmenté de façon drastique. On sait aussi que de manière générale, les victimes d’abus sexuels sont majoritairement des femmes et des petites filles. Il s’agit là d’infractions pénales desquelles ces femmes ont le droit d’être protégées et il y a aujourd’hui encore beaucoup de progrès à faire.» Du point de vue de la loi, elle note qu’en Suisse, la personne victime mériterait davantage d’attention.

A l’instar de la pasteure, Célia Jeanneret invite les chrétiens à ne pas rester inactifs. «Nous devons nous rendre compte que cette violence, elle se vit à côté de chez nous. On habite peut-être proche d’un salon de prostitution dans lequel les femmes sont exploitées, ou peut-être qu’on entend notre voisin du dessous frapper sa femme ou son enfant. Dans ces cas-là, nous devons avoir le courage de chercher à savoir ce qui se passe, puis d’agir en conséquence.» Pour cette juriste active dans les milieux de la prostitution, il s’agit d’aider les femmes à prendre conscience de leurs droits. Elle témoigne en outre qu’elle observe une soif de Dieu chez la plupart d’entre elles. Comme elles ont peu de perspective, l’idée d’un Sauveur capable de les tirer de leur détresse les touche tout particulièrement. «Je vois typiquement trois types de réaction à la souffrance dans ces milieux de la prostitution: le déni, le suicide ou la recherche de Dieu. En tant que chrétiens, nous avons un immense espoir à partager.»

Quelles avancées dans nos Églises ?

Suite de l’état des lieux: en ce qui concerne la place donnée à celles dans les milieux d’Eglises et parmi les chrétiens plus largement, Lula Derœux se dit réjouie de voir l’évolution des possibilités données aux femmes désireuses d’entrer dans la vocation pastorale, en tout cas dans son union d’Eglises. «La pasteure doit parfois encore se faire – malgré elle – la représentante de toutes les femmes pasteures quand elle prend la parole, mais j’ai l’impression que les mentalités sont en train de changer. Pour ma part, je me sens tout à fait épanouie dans mon rôle, que je partage avec un collègue au sein de l’Eglise pour laquelle nous sommes engagés.»

En ce qui concerne les droits des femmes, l’enjeu réside selon elle plutôt dans ce qui est transmis dans la communauté. «En tant que chrétiens, en tant qu’Eglise, comment peut-on rappeler certaines vérités ? Le sens de la Bible a souvent été tordu par le passé pour justifier des violences conjugales. Comment pouvons-nous réparer ce tort? Comment mieux se mettre à l’écoute ?» Et d’ajouter que la question du viol conjugal reste encore très taboue dans l’Eglise, alors qu’elle s’est démocratisée dans d’autres milieux.

Lieu de vérité et d’amour

Célia Jeanneret constate quant à elle que dans l’Eglise se retrouvent victimes et abuseurs. «L’Eglise n’est pas une bulle en dehors du monde. Qu’elles soient repenties ou non, on trouve en notre sein des personnes qui commettent des violences domestiques ou conjugales. C’est parce que nous avons l’amour de Dieu que nous sommes capables d’être là pour la victime comme pour l’auteur des abus.

Avec ce dernier et sans omettre tout ce qui doit être entrepris d’un point de vue légal, un véritable parcours de repentance et de restauration peut être engagé au sein de la communauté.» Et de citer le passage biblique qui motive son travail: «Mais en disant la vérité dans l’amour, nous grandirons à tout point de vue vers celui qui est la tête, Christ» (Eph. 4, 15).

«Je rêve de voir des Eglises de plus en plus sensibilisées, prêtes à agir dans les cas où une femme n’est pas protégée comme elle le devrait. Je rêve de voir des chrétiens qui ne craignent pas de voir une victime ou un abuseur passer la porte de leur Eglise, parce qu’ils savent comment les recevoir», conclut Célia Jeanneret.

Source & Crédit Photo : Christianismeaujourdhui.info

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